Vous avez aimé le portrait de Jean Lassalle brossé par Francis Cha à la manière de Tocqueville. Notre écrivain oloronais récidive. Coiffant sa casquette de professeur d’économie, il nous présente cette fois-ci l’économie du Haut-Béarn toujours à la manière de… Tocqueville. En s’inspirant de l’un des ouvrages les plus connus de ce philosophe politique, homme politique, historien, précurseur de la sociologie et écrivain français, « De la démocratie en Amérique ». Si l’original date de 1835 pour son premier tome, le pastiche que vient de m’adresser Francis Cha date, lui, de 2016 avec une première publication dans la revue « Vent d’Oc ».
De la démocratie en Haut-Béarn
De l’économie.
Dans les textes officiels et la presse, l’expression «Haut Béarn » couvrait les vallées d’Aspe, d’Ossau, de Barétous, de Josbaig, les coteaux de Lasseube et de Lucq de Béarn.
Les habitants étaient attachés à cette qualification qui était fort valorisante.
Les palois et les habitants du nord du département, étaient moins enthousiastes car, ayant subi pendant des décennies l’opprobre d’être « bas-pyrénéens », ils craignaient d’être qualifiés désormais de « bas- béarnais ».
Il y avait peu de territoires au sein de la République aussi bénis des Dieux : un climat changeant mais tempéré, des paysages qui allaient du grandiose au charmant, une économie combinant harmonieusement une industrie ouverte sur l’étranger et des activités agricoles et pastorales.
Deux grands chantiers d’infrastructure avaient marqué et marquaient encore l’aménagement de ce territoire :
Les élus locaux se battirent durant des années pour l’ouverture du tunnel routier du Somport qui devait, par la magie du désenclavement, apporter emplois, richesses, progrès et même réouverture des écoles en Vallée d’Aspe.
Pour les habitants d’Oloron et des villages situés sur la RN 134, le bruit et la pollution atmosphérique étaient jusqu’à maintenant le résultat le plus concret.
Alain Rousset, Duc d’Aquitaine propriétaire d’une bergerie en lescunois était fort attaché à la réouverture de la ligne ferroviaire Pau -Canfranc. Des travaux de remise en état furent donc entrepris entre Oloron et Bedous. On aurait pu quasiment les qualifier de pharaoniques, mais cette qualification était quelque peu inadéquate, Khéops Kephren et Mykerinos étant plus intéressés par la construction de pyramides que par celle de chemins de fer.
Le Duc décida de cette réouverture espérant qu’elle serait la première étape d’une ligne Pau-Saragosse reliant le nord de l’Europe à l’Espagne.
Si les choses ne se déroulaient pas selon ces espérances, cette réouverture risquait d’être un beau gâchis d’argent public. Cette décision était donc un pari sur l’avenir.
L’industrie locale vivait de la vente de roues d’aéronefs et de chocolat dont le fumet embaumait Oloron par temps de pluie.
Le chocolat était considéré par l’opinion générale comme réduisant les tensions psychologiques insupportables. Il fallait donc s’attendre à ce que la demande mondiale fut en constante augmentation.
L’emploi semblait donc d’une solidité certaine. Cependant le risque existait que les actionnaires fort lointains décidassent de produire du chocolat dans des nations où le coût des salariés étaient moins élevé.
Il en était de même de toutes les activités locales.
Les « savoir-faire » locaux était probablement la seule voie pour maintenir les emplois : ceux des ouvriers, techniciens, cadres de l’industrie, des vignerons du Jurançon, des bergers de montagne, des éleveurs, des agriculteurs et de tous les acteurs économiques et sociaux étaient les garants de la réussite collective locale.
La nature avait offert à cette contrée des montagnes vertigineuses où purent se développer les pratiques des sports d’hiver. La saison de ski oscillait en permanence entre le trop et le pas-assez de neige.
Le pain étant ainsi à peu près fourni les jeux embellissaient les jours et les soirées des habitants.
On concourait pour la meilleure garbure, le chien de berger le plus futé, les polyphonies les plus complexes. On soutenait les équipes sportives, on chantait et on dansait dès que l’occasion se présentait.
Certes les inscrits au pôle emploi, les bénéficiaires des restaus du cœur étaient fort nombreux en ce territoire mais moindre en proportion que dans d’autres lieux de la République.
Si quelque géographe avait voulu figurer en rose sur un planisphère les régions du monde où régnait un certain bonheur de vivre, nul doute que le Béarn y fut représenté, non en rose vif certes, mais en rose tout de même.
Francis Cha
On a véritablement de la chance d’être des hauts béarnais, mais peut-être, bien plus encore de lire ce superbe texte. Merci Mr Cha et merci à notre blogueur de ce partage.
J’aime notre Haut Béarn…
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Plaisir d’écrire pour Francis Cha, et surtout plaisir de lire pour tous les abonnés d’Oloronblog. Que c’est rafraîchissant un tel texte, rafraîchissant mais aussi tellement pertinent ! Bravo à son auteur …
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Ne manque à ce lieu magique qu’ un homme, qui puisse lui donner la puissance, dont il manque, pour se faire entendre des Dieux, si éloignés. Un d’ entre nous, bien connu de tout le monde, s’ est dévoué pour porter cette parole, mais son chant dans les travées ne semble pas attirer les Dieux, plus que Cha.
Heureusement que pour moins que ça, notre Cha, nous remplit de bonheur de lire ça.
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