Moment d’antiparlementarisme primaire


Le 11 juin, nous aurons donc dans notre circonscription le choix entre 14 candidates ou candidats. L’un(e) de ces 14 siègera quelques semaines plus tard à l’Assemblée nationale. Mais à l’Assemblée nationale, pour quoi faire ?

Commentaire désabusé dans Sud-Ouest du 20 mai de Philippe Plisson, député sortant de la Gironde : « Chez les députés, c’est comme dans le reste de la société. Grosso modo, il y a un tiers de gens qui ne s’investissent pas, un tiers de ‘branleurs’, pour être vulgaire. Puis un tiers de gens qui font le service minimum et un tiers qui bossent, s’investissent. C’est injuste de mettre tout le monde dans le même sac ». Est-il nécessaire de préciser, à la lecture de ce jugement sans appel, que l’auteur de ces propos ne se représente pas cette année ? Je suis à la fois d’accord… et pas d’accord avec ces propos.

Pas d’accord avec Philippe Plisson parce que les députés ont dans leur immense majorité un emploi du temps surchargé. Ils courent sans cesse par monts et par vaux, de réunion en réunion, de manifestation en manifestation. Cumulards pour la majorité d’entre eux, ils doivent jongler avec deux ou trois agendas : celui de l’Assemblée nationale, celui de leur commune, celui de leur intercommunalité et même, pour certains d’entre eux, celui de leur métier en dehors de la politique. Pas une minute à eux. La vie de famille passe au second plan. Tout comme les loisirs et… les temps de réflexion sans lesquels l’action publique n’est que bougeotte inefficace.

D’accord avec Philippe Plisson, parce que cette énergie débordante est mise le plus souvent au service de tout autre chose que des missions qui leur ont été données par les électeurs qui les ont désignés pour siéger à l’Assemblée. Quelles sont ces missions ? Voter la loi et contrôler le gouvernement. Peut-on croire qu’il est possible de remplir ce contrat en passant au maximum deux jours par semaine à Paris. Et encore… on y vient le mercredi pour que vos électeurs vous aperçoivent à la télé lors de la diffusion des Questions au gouvernement.

En réalité nos députés consacrent la majeure partie de leur temps… à préparer leur réélection. À tenir des permanences dans leur circonscription où ils jouent le rôle d’assistant(e) social(e) en recevant à la queue-leu-leu des administrés venant solliciter des interventions de tous ordres : recommandation pour un emploi, règlement d’un conflit avec une administration, obtention d’un passe-droit etc. etc. Et en dehors de cela, ce sont les inaugurations, les dépôts de gerbe, les participations à des congrès et autres colloques locaux etc. etc. Toutes occasions de rencontrer des électeurs potentiels.

D’accord, il y a une pointe de mauvaise foi dans l’énumération qui précède. Mais sachez que j’exagère à peine. En résumé, tel qu’est conçu aujourd’hui le rôle du parlement, telle qu’existe aujourd’hui une loi qui n’encadre pas suffisamment le cumul des mandats, des mandats qui plus est dont le renouvellement n’est pas limité dans le temps, le député ne sert à pratiquement rien. Se souvient-on d’ailleurs du moindre acte important accompli par le parlementaire de notre circonscription en sa qualité de député pendant le mandat qu’il achève ? Et la réponse eut été la même s’il s’était agi d’un autre que lui.

À quoi sert-il alors de se déplacer les 11 et 18 juin pour aller glisser un bulletin dans l’urne ? Peut-être parce qu’en fonction du résultat national ce statut du député évoluera. Ensuite parce que, si voter n’est pas un devoir, c’est un droit. Et pour une fois que l’occasion nous est donnée d’exercer un droit…

8 commentaires sur « Moment d’antiparlementarisme primaire »

  1. tres bonne remarque: « Qui de l’œuf ou de la poule est arrivé en premier  » qui de l’électeur ou du député a dévoyé la fonction ?

    je me pose toujours la question quand je vois des gens dénigrer l’élu avec toujours les mêmes commentaires: « on le voit jamais », « il ne fait rien pour nous »  » il ne fait que parader » et aller quémander en suivant un « p’tit service » « un passe-droit » ou aller lui serrer la louche dés qu’ils le peuvent…avec si possible le progrès passant par là un petit selfie qui va bien pour l’album de famille ou fessebouc « là c’est moi avec le député Duchmol sinon j’ai celle là avec le sénateur tartempion  »

    Je n’ai pas la réponse.

    Sinon il parait que le papa de marc Oxibar fait la tournée des boites aux lettres pour distribuer la photo du fiston toujours sourire Ultrabrite. Il roule pour Fillon à nouveau après avoir marché pour Macron..Si papy doit faire toutes les communes de la 4e il va falloir reporter les élections.Surtout avec le Macronien qui se présente en face ( ou avec) qui est marathonien et adepte des marches commandos du 1er rpima ( j’ai pas dit PR ima). .C’est amusant d’ailleurs sur leurs professions de foi tous les candidats veulent défendre  » leurs territoires » alors que je croyais que c’était une notion surannée mais il faut bien , c’est vrai, rassurer l’électeur « meste à case »

    . Donc nous disions? de l’oeuf ou de la poule ?

    Quand on dit que la politique c’est une affaire de famille. La banque aussi.

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  2. Je crois de plus en plus que notre démocratie avec ce système parlementaire a atteint ses limites. Pire, je crois qu’il entretient uniquement un système capitaliste, en projettant l’illusion, savamment entretenue, que sans, tout serait pire… On l’a encore mesuré pendant les présidentielles. La démocratie actuelle est devenue un frein à toute forme de révolte ou de révolution sociale. Le terme démocratie devient une sorte d’objet magique, dont-il suffirait de frotter les urnes pour qu’elle fonctionne. Mais pour qui ?… Entre les carrièristes, les affairistes et addicts au pouvoir, qu’elle place reste t-il au peuple ? Tout cela n’est que farce dont nous sommes les pigeons. L’alternative est t-elle possible en démocratie ? Et qu’est-ce qu’une démocratie ? Tocqueville était fasciné par la naissance de la démocratie américaine, mais rapidement, il en voyait les limites. Et nous, nous sommes au pied d’un obstacle qui semble insurmontable, bloqués par le sens des mots et l’instinct de survie des institutions…

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      1. moi, ça me va…les pigeons que nous sommes vont voir un ministre macronien ne pas passer le pont de l’Ascension, grâce à ce fameux contre-pouvoir démocratique que personne ne supporte à gauche comme à droite, extrêmes y compris.
        abonnez-vous au Canard, vous n’aurez pas à imaginer autre chose que la démocratie « canardesque », celle qui a coulé VGE, FF, NS comme elle coulera EM s’il n’y prend pas garde !!
        la même qui va couler le bouffi US d’ici 1 an !!
        la même qui aura à l’usure la tête du Turc !!
        la même qui n’existe pas de l’autre côté pour mettre à la retraite le cosaque de service ou le chaviste à l’agonie.
        je dis ça , je dis rien !!

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    1.  » je crois qu’il entretient uniquement un système capitaliste, en projettant l’illusion, savamment entretenue, que sans, tout serait pire »
      Venezuela, 2005-2015, 10 ans de « démocratie participative »
      2005, la théorie à appliquer
      https://www.monde-diplomatique.fr/2005/06/LOPEZ_MAYA/12516
      2015 la théorie appliquée
      https://www.lesechos.fr/16/02/2015/lesechos.fr/0204163025218_voyage-dans-la-pire-economie-du-monde.htm
      et en 2016-2017, ça ne s’arrange pas….
      « Où est passée la rente pétrolière de ces toutes dernières années ? A qui profitent les réseaux d’économie clandestine et le marché noir qui n’ont pu fleurir sous M. Maduro sans complicités au plus haut niveau de l’Etat ? La nomenklatura chaviste ne fait pas la queue à l’aube pour acheter du lait en poudre dans des villes où il est dangereux de sortir la nuit. »
      En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/05/30/le-venezuela-ou-l-histoire-d-une-tragedie-annoncee_4928863_3232.html#puUcMRopDz4FeHMV.99

      question : on échange « notre » démocratie contre quoi ?

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  3. PAs eu le temps de tout lire, mais d’accord avec ce que j’ai déjà parcouru… Dans mon ancienne vie, animateur social, j’ai toujours milité pour l’organisation communautaire (pas le communautarisme), seule théorie capable de laisser une démocratie agonistique se développer. Mais au nom de « l’égalité républicaine », (qui a bon dos, de plus à géométrie variable…), il est hors de question que les institutions laissent vivre ce concept. Et on forme à la pelle des travailleurs sociaux qui au final ne sont que des gardiens de l’ordre.

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