Drame du 25 juin 2015 à la maternité : un responsable désigné (« l’hôpital-institution »), mais zéro coupable


La République du samedi 25 février revient sur le drame que vit une famille depuis le 25 juin 2015 : une maman de 9 enfants tombée dans le coma après avoir accouché à la maternité de l’hôpital d’Oloron. Une expertise médicale indépendante a permis de relever « des erreurs diagnostiques mais aussi organisationnelles nombreuses qui ont contribué à l’issue vers un coma végétatif évitable ». Le rapport des experts note par ailleurs des soins « non-conformes aux bonnes pratiques, avec retard à la transfusion(…), retard à la pratique d’examens complémentaires pour apprécier la gravité de la situation, retard à la décision de transfert ou de reprise chirurgicale, absence d’échanges entre praticiens ».

Ce constat accablant a amené la Commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux d’Aquitaine à conclure tout récemment à la responsabilité de l’hôpital d’Oloron dans cet accident. Le patron de la santé en Aquitaine, ci-devant directeur général de l’Agence régionale de santé, souligne à La République que : « …aucune faute médicale n’a été retenue. C’est la responsabilité institutionnelle de l’hôpital qui est engagée ». Sans doute parce que je ne suis ni expert, ni praticien, ni procureur, cette conclusion m’a fait bondir.

Donc, si l’on comprend bien, seul « l’hôpital », ce monstre froid et impersonnel, serait à l’origine des erreurs de diagnostics, des erreurs organisationnelles, des soins non conformes aux bonnes pratiques, du retard à la transfusion, du retard à la pratique des examens complémentaires, de l’absence d’échanges entre praticiens, tous dérapages mis en évidence par le rapport d’expertise ? Il y a là une contradiction qui m’échappe.

C’est « l’hôpital-institution », structure sans nom et sans visage, qui est responsable de ces erreurs et retards constatés par l’expertise ? C’est « l’hôpital-institution », structure sans nom et sans visage, qui a décidé de soins non conformes ? C’est à « l’hôpital-institution », structure sans nom et sans visage, que doit être imputé le manque de communication entre les praticiens ? Comme si « l’hôpital-institution » était une machine qui fonctionnait, sans aucune intervention humaine à laquelle on puisse imputer ses réussites comme ses échecs.

 La Commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux a donc décidé que la famille de la victime devait être indemnisée. Si l’on s’en tient à l’avis du patron de la santé en Aquitaine (pas de faute médicale, responsabilité de l’hôpital), c’est donc l’hôpital, c’est-à-dire le contribuable, qui en supportera la charge. Sauf s’il était établi une erreur humaine personnelle. Il est donc important de savoir ce que sous-entendent les propos de la directrice de l’hôpital dans La République : « La direction de l’hôpital est en phase d’analyse du dossier, pour décider des suites à donner à la procédure ».

Étant bien entendu que dans ce domaine aucune situation ne ressemble à une autre, le quotidien breton Le Télégramme fait part dans son édition du 9 mars 2016 (article à retrouver en cliquant sur le lien ci-dessous) de la Cour administrative d’appel de Nantes contre le centre hospitalier universitaire (CHU) de Brest : le CHU a été condamné au versement de  près d’un million d’euros de dommages et intérêts à la famille d’une parturiente restée très lourdement handicapée à la suite de l’accouchement de ses jumeaux. L’hôpital brestois devra également verser près de 217 000 € à la Caisse primaire d’assurance-maladie du Finistère, pour les frais de santé qu’elle a déboursés. La Cour administrative précise : « La prise en charge obstétricale de [‘accouchement, puis des complications hémorragiques, a été conforme aux règles de [‘art et aux données acquises de la science », et ajoute : « En revanche, plusieurs manquements ont été relevés dans la prise en charge de sa réanimation, postérieurement à l’accouchement par césarienne. ». À méditer.

L’article-du-telegramme

Un commentaire sur « Drame du 25 juin 2015 à la maternité : un responsable désigné (« l’hôpital-institution »), mais zéro coupable »

  1. Très déçu de ne voir aucun commentaire de la part de représentants du corps médical. Car le sujet développé dans cet article interpelle, il doit déranger pour que la profession fasse ici l’autruche.

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